Une fois dehors, sur le chemin du retour, Alexandre, plus perspicace que son père, me dit :
- c’est quoi c’est conneries de jardinage ?
J'étais interloqué.
- T’as du mettre de sacré gants de protection pour pas avoir la moindre égratignure.
Il ne faut jamais mentir, ça finit toujours par se retourner contre vous, et dans mon cas, ça n’avait pas attendu longtemps.
- Tu fais quoi dans la vie ? Vraiment ! Me raconte pas de crac.
Voila que j'étais coincé. Je savais que j'étais un piètre menteur et l’expérience précédente me le confirmait. Et puis je n’avais guerre le temps de chercher un mensonge plus crédible. D'autant que je n’avais pas envie de mentir à Alexandre, si notre relation devait continuer sur des mensonges quelques jours à peine après son début alors tout était foutu. Mais, pouvais-je lui dire la vérité toute crue sans qu’il me détestât et m'abandonnât presque immédiatement ?
Je restai silencieux quelques instants, complètement abattu. Ma naïveté m’avait fait penser que ce sujet ne viendrait jamais sur le tapis. Bien pire, je n’ai jamais pensé qu’on aurait besoin de l’aborder. Bien pire encore, je n’ai jamais pensé à penser que ce sujet aurait besoin d’être abordé un jour. J'étais heureux avec Alexandre et ça me suffisant. Ce n’était pas de la naïveté c’était de la connerie. Je me sentis écrasé comme si le monde devait finir tantôt. Le bonheur que j’avais connu grâce a Alexandre allait aussitôt être englouti et je souhaitai être englouti avec dans les entrailles de la Terre. En plus, je savais le mal que je allais faire à Alexandre et ceci m’était intolérable. Comment autant d'idées, toutes plus stupides les unes que les autres, peuvent-elles nous assaillir en un laps de temps aussi court dans les moments de doute ?
Des larmes me vinrent aux yeux. Alexandre me fit asseoir sur un banc et je m’effondrai en pleurs, moi qui me croyais si fort et malin je n'étais qu’un enfant qui ne connaissait rien de la vie et qui ne désirai plus la vivre si c’était à ce prix. Je voulais dire quelque chose mais ce n’était que des sanglots qui s’échappaient de ma bouche et j’enfouis ma tête dans la poitrine d’Alexandre à la recherche d’un peu de chaleur et de réconfort avant de lui porter, traîtreusement, le coup fatal de la révélation. Je me haïssais.