Le ventre vide j’ai erré une partie de la nuit dans les rues de Paris puis j’ai cherché un coin sombre sur les quais de la Seine et j’ai tenté de dormir un peu. Ce matin je me suis rendu gare de Lyon pour tenter de récupérer mes affaires. J’ai été découragé par l’alignement des casiers tous identiques, comment retrouver celui qui contient toute ma richesse? Le préposé n’a rien voulu savoir, il fallait que j’aille déposer plainte au commissariat et alors, avec la présence d’un officier de police, il pourrait tenter de me rendre mes affaires. Devant le commissariat j’ai hésité, dans ma situation je ne voulais pas avoir à faire avec la police.
Alors j’ai fait la manche. J’ai demandé de l’argent sans regarder ceux à qui je le demandais. La honte m’a accablé, ma descente aux enfers ne faisait que commencer et elle était loin d’être finie. Avec la petite somme que j’ai pu amasser, j’ai acheté un paquet de jambon blanc et une baguette à la supérette du coin et je peux témoigner du bien que ça fait lorsque ça se retrouve dans un estomac vide depuis plus d’un jour.
Avec le ventre plein, mes forces et mon moral sont revenus, on ne se laisse pas abattre si facilement à 18 ans. J’utilise une petite pièce pour passer un coup de fil chez moi. C’est mon père qui décroche. Je raccroche. Que pourrais-je lui dire? Il est hors de question que je lui mendie quoi que ce soit. J’avais espéré que ma mère aurait répondu mais c’est raté. Je prends la décision de couper définitivement les ponts et de me démerder par moi-même.